Le contrecoup est rude pour les enseignes de prêt-à-porter. Et encore plus pour les salariés. Après la fermeture pour cause sanitaire, c’est la fermeture pour cause financière qui attend des centaines d’enseignes. Fragilisées par les deux mois de confinement dû à la pandémie de coronavirus, beaucoup font face à une crise sans précédents et à d’importants plans sociaux.
Cache Cache, Morgan, Bonobo… « Notre commerce sera en mode survie pendant un an »L’enseigne André a été mise en redressement judiciaire début avril après la perte de 4 millions d’euros en quinze jours selon BFMTV, puis Orchestra (2 900 emplois) le 29 avril, Naf Naf (1 170 employés) le 15 mai, Camaïeu, qui emploie 3 900 salariés en France et dont le chiffre d’affaires aurait chuté de 95 % à cause du confinement le 26 mai, La Halle (chaussures et vêtements, regroupant plus de 6 000 employés) le 2 juin… La liste est longue. Le 22 juin, c’est au tour du leader du marché masculin en France, Celio, de demander au tribunal de commerce de Bobigny à être placé sous procédure de sauvegarde.
« Douche froide »
Si ces enseignes d’habillement allaient déjà mal à la suite du mouvement des gilets jaunes et des grèves contre la réforme des retraites pendant les soldes d’hiver, le Covid-19 a contribué à accélérer leurs fermetures. Mais derrière ce secteur en crise il y a également des hommes et des femmes qui apprennent leur licenciement, parfois du jour au lendemain.Yves Rocher : « Ce serait bien qu’à Noël 2021, nous soyons revenus au niveau de 2019 »
« On a appris il y a une semaine que le magasin n’allait pas être repris et donc qu’on allait fermer définitivement », confie sous couvert d’anonymat une responsable d’un magasin Orchestra, spécialisé dans la mode bébé-enfant, mercredi 24 juin, le dernier jour d’ouverture de la boutique.
« L’annonce a été une douche froide, embraye-t-elle. Une semaine pour prévenir d’une fermeture c’est très, très peu ». Surtout quand la nouvelle ne vient pas directement d’un communiqué officiel de l’entreprise. « On a un groupe personnel [de discussion, ndlr] entre responsables de magasins et une personne a envoyé la liste des boutiques qui étaient reprises et on s’est rendu compte qu’il n’y avait pas la nôtre », explique la responsable au téléphone. « On a ensuite eu un appel du directeur régional qui nous épaule énormément et nous soutient. »
Le groupe de vêtements pour enfants et d’articles de puériculture Orchestra-Prémaman était en procédure de sauvegarde depuis septembre 2019 mais cette responsable, qui fait partie des 600 salariés non repris, pensait que son magasin était protégé. « On n’a pas constaté de baisse de la clientèle ni du chiffre d’affaires. Certes il y avait des doutes sur de possibles fermetures de boutiques mais pas la nôtre ».
« On ne sait pas à quelle sauce on va être mangé »
L’annonce de la fermeture est également une surprise pour ce magasin La Halle aux chaussures du Centre-Val de Loire, où l’ambiance est extrêmement pesante. « On ne sait toujours pas à quelle sauce on va être mangé », confie à « L’Obs » la directrice du magasin, avec un rire nerveux.
En effet, à la date du 11 juin, aucune des 25 offres de reprise partielle des enseignes La Halle aux chaussures et vêtements, annoncées par un communiqué du groupe Vivarte, ne concernait ledit magasin. Suite à un nombre encore trop important de licenciements, les futurs repreneurs avaient finalement jusqu’au 24 juin minuit pour se manifester. Pourtant « la liste des magasins repris n’est toujours pas connue », déplore la directrice qui se dit obligée d’aller chercher l’information auprès des syndicats faute d’être épaulée par ses supérieurs.
Petites ou grandes, quelles entreprises aider ?« C’est stressant, pour les équipes et pour moi, de ne pas savoir », ajoute cette mère célibataire. « On va peut-être nous dire, aujourd’hui ou demain, qu’il y a un repreneur, le tribunal de commerce va peut-être nous annoncer que la fermeture a un effet immédiat, on ne sait pas si on fait une liquidation, quand on s’en va, on ne sait rien ».
Des milliers de salariés inquiets
« Aujourd’hui on ne peut pas chiffrer le nombre de salariés qui vont être licenciés », indique Karim Cheboub, secrétaire CGT du Comité social économique de La Halle magasin, qui se dit inquiet par l’ampleur de la crise. « Il y a plusieurs offres, notamment du groupe Beaumanoir et le jugement du tribunal sera rendu le 6 ou 7 juillet. L’option la plus optimiste est la reprise de 3 300 salariés au maximum sur 5 500, soit 2 200 personnes licenciées ».
« On a également eu la garantie que le transfert de contrat se fera dans les mêmes conditions, avec le même salaire, le même statut et la même classification », se félicite le porte-parole de l’intersyndical. « Le groupe Beaumanoir n’emploie pas de cadres seulement des agents de maîtrise, donc dans 15 mois, tu risques de changer de statut et de perdre en salaire », s’inquiète la directrice du magasin La Halle aux chaussures.
Renault : 15 000 suppressions de postes et un avenir à réinventerAutre possibilité pour les employés : faire une demande de départ volontaire mais « ils doivent faire la démarche avant le 6 juillet alors qu’ils ne savent pas quels magasins sont repris », précise le représentant syndical. « Et cette demande n’est même pas sure d’être acceptée car le nombre de départ volontaire ne doit pas être supérieur au nombre de postes supprimés sur la même zone géographique ».
June 28, 2020 at 02:00PM
https://ift.tt/2CPoM35
« On ne sait pas à quelle sauce on va être mangé » : l’inquiétude des salariés du prêt-à-porter face à la vague des licenciements - L'Obs
https://ift.tt/3dmMS1C
sauce
No comments:
Post a Comment